Pourquoi JASS ?

Pourquoi JASS ?
Le JAZZ a dans les veines du sang africain, c'est certain - jaja signifie "danser", jasi "être excité"- ; mais peut-
être aussi une racine enfouie, d'origine indonésienne -"jaiza" faisant écho aux sons des percussions. En français dirions-nous : "cela va faire jaser", parler ? Le 2 avril 1912, le Los Angeles Time évoque la jazz ball irrécupérable du lanceur Ben Henderson. Dérivé de l'argot, le mot jizz, renvoie à l'énergie, au courage et à la vigueur sexuelle. Le jasz a également l'odeur entêtante du JASMin, des parfumeries françaises de New-Orleans. A moins que l'étymologie du mot ne vienne de JASper, danseur esclave des années 1820, d'une plantation louisianaise ? Ou JASbo Brown, musicien itinérant et joueur de blues avant-gardiste de la fin du XIXe siècle ? Musique interdite, jouée dans les bordels, ce langage d'origine black american établit le lien indivisible entre le corps et l'esprit. Par la perpétuelle énergie de son discours, il puise dans l'Instant la force d'enrichir son long parcours, toujours bien vivant. J-ASS donne la fièvre et guérit ! Essayez-voir.

vendredi 1 juillet 2011

Un PRINCE au Stade de France.



"Il y a tant de technologies que les gens oublient la technique musicale, la connaissance instrumentale. Moi, j'aime bien les machines à laver, mais c'est pour les vêtements. Je n'aime pas entendre les machines à laver jouer ma musique..."
Prince
.



VIDE OU REMPLI ?

La dernière fois c'était pour les Stones, le 9 juillet 2003.


Il aura fallut attendre Prince pour me faire revenir au Stade de France. Non, je n'ai jamais été gaga des grandes salles résonnantes, encore moins des parcs de sportifs. Souvent ça donne : "et ils sont où les musiciens ?" Et puis, " pam papa pa papa paaa" m'écoeur. Comme un vieux-jeune, je me rends dans les caveaux souterrains, dans des salles intimistes, jalonnées de piliers bétonnés, en ces lieux confinés où l'on ne peut parfois pas entrer. C'est comme ça. Pourtant, je n'ai pas longtemps hésité. Pour Prince, j'irais même au Parc des Princes s'il le fallait.

Ayant mis de côté sa carrière discographique pour se consacrer entièrement à la scène, le Kid de Minneapolis se passe depuis plusieurs années de maisons de disques pour publier ses albums. Son dernier enregistrement, 20Ten, avait essuyé la critique, son précédent triptyque LotusFlow3r n'avait pas fait l’unanimité. Peut-être parce qu'ils étaient passés dans les mains des fans – gratuitement relayés par la presse pour le LP. – avant d'avoir été soumis aux oreilles chatouilleuses des "spécialistes" ?

Prince au public : "Vous en avez assez de ce que vous entendez à la radio ?"

C'est un habitué des challenges, ceux de hautes voltiges, d'Icare et d'or fait. Constamment illuminé, prend des risques. Ose dans l'urgence. Prend Paris pour faire vibrer le Stade de France. Ecouler 80 000 tickets en tout juste un mois ? Les détracteurs misent sur un flop. Aucune catégorie n'affichait complet, à seulement treize jours du concert. Les médias posaient des questions. Il leurs a répondu, hier soir, en chantant.

Faisant, moi aussi, parti des 7000 tickets bradés à 35 euros, je me questionnais sur le déroulement du show,  la confiance pourtant sereine de ne pas m'être trompé. Il y eu  50 000 personnes (seulement !) ; toutes gonflées à bloc et bien décidées de faire gronder l'assourdissante rumeur de la funk music.


PRINCE ET SON NEW GENERATION BAND – Hier soir et demain matin.

Le temps d'une appartition remarquée au Grand Journal, le Prince arrive, tout droit de Montréal, sans s'être changé. Perché sur ses grands talons noirs, l'homme qui ne compte plus ses anniversaires pour toujours rester jeune, donne tout de suite le ton. Son exubérance est tout aussi grande au dedans.

 John Blackwell et Maceo Parker sont toujours à ses côtés. Il y a désormais les femmes. Ida Nielsen et ses beat de basse endiablés. Cassandra O'Neal apportant son swing aux claviers. Et puis, il y a Andy Allo, délicieuse chanteuse camerounaise à la soul fragile et mature. Prince dira (toujours modestement) : "J'ai un groupe d'une qualité incroyable. C'est comme une équipe de basket all stars : chacun est champion dans son domaine. Quand on joue ensemble, il y a un trop plein d'énergie tel qu'il faut au moins un Stade de France pour l'acceuillir."


Tous les contrastes dans la touche d'un charisme. Plus qu'une star, une étoile filante qu'on ne peut attraper.


Chaque projet, marginal au précédent, est dans la rupture du suivant. L'histoire continue depuis plus de 30 ans. Il y a les wouhteurs des tubes d'une génération, ne voyant l'artiste qu'à travers le miroir nostalgique d'une époque - un peu plus - débridée. Il y a les mélomanes qui ciblent (Crystal ball, Rainbow Children, Sign of the Times ou l'étonnant N.E.W.S...), admirent, de loin, son talent. Il y a tous les autres. Il y a surtout les fans incontestés, les Princemaniacs je dirais. Comme il y a des Zappaphiles, des Magmaïens, des Deadheads, des Zorniens... les Princemaniacs, eux aussi, connaissent tout. Les inédits, les pirates, les singles, les rarities, les coffrets double bonus, les officieux, et les pas encore sortis... L'artiste représente une succession de toiles marginales. Il n'y a pas plus belles façons de l'écouter que d'aller l'entendre, visuellement, jouer.

Avant-gardiste outrecuidant, concepteur d'espace sans équivalent. C'est une icône débridée, imperceptible. Qui est ce maître du contre-pieds ? Syncrétique allégorie de la black culture, performer sans égal, cinéaste raté, dénicheur de talents au flair aiguisé, créateur sans concessions, songwriter trans-genres, parfois perdu dans l'immensité de son talent, en avance – même sur lui –, Prince est-il victime de son incroyable génie ?

Son style s'est construit à la croisées de toutes les musiques. Il en a ainsi fait le sien. Une synthèse truffée de créativité. Dans chaque soupir de note, c'est Funky ! Pop-Rockeurs des bizarreries, crooner androgyne, volubile guitariste à l'attaque carnassière, bassiste aussi. C'est une constante chez lui : quand il commence à jouer, monsieur le Prince ne peut plus s'arrêter.


TROIS HEURES DE SHOW, NON STOP.





Dès son entrée, Prince annonce la couleur : "Dance Music Sex Romance". Lors de la première partie, majestueusement assurée par la chanteuse de rythm' n'blues Sharon Jones et par ses Dap-Kings, Prince fait une apparition remarquée. Sa guitare rugissante - une sublime Hohner Telecaster - fait instantanément grimper la température en zone rouge.

Habillé d'une chemise de soie d'or, surmontée d'une longue tunique chasuble blanche, d'un bijou en croissant de lune à chaque oreille et d'un gros médaillon solaire en pendentif, le showman a pris le soin de changer ses "chaussures" sur scène, d'enfiler ses boots blanches à frou-frou face à ses fans en délire.

Cette tournée européenne couronne une série de show dans les plus grandes villes d'Amérique. Avant la France, il y eut les triomphes de Los Angeles, New York, Montréal... Autant dire que le band est bien huilé. D'une façon presque improvisé, c'est dans son répertoire de plus de 300 titres que le grand Prince est venu puiser sa sélection de la soirée. Générosité inspirée. On sent qu'il veut provoquer l'étonnement, puis s'amuser.

A ses propres compositions vient se mêler une ribambelle de reprises transfigurées : Everyday People de Sly & The Family Stone, quelques mesures du Freak de Chic, Les Beattles... un rif de guitare en cocotte, et tout le band enchaîne à l'unisson : Born Together. Comme dans une jam session, deux trois regards, un p'tit pont et on enchaîne sur le morceau suivant. 25 secondes ou 12 minutes, c'est Prince qui choisit.
 Et puis vint cet étonnant hommage au défunt Mickael. Le célébrissime tube, Don't Stop 'Til You Get Enough, ici revisité à la mode Princière, Entre Cream et Purple Rain, une odyssée judicieusement imbriquée, la fin du mur, cette guerre froide qui n'a jamais existé. Pudiquement, sans prononcer mot, Prince répond à tous ceux qui chercheraient encore à comparer...


Autour de lui, un groupe époustouflant, des instruments bien amplifiés, ses ingrédients explosifs qui fusionnent en un cocktail Molotov très épicé. Le mythique Maceo Parker, ex-saxophoniste de James Brown, livre ses toniques improvisations. Hypnotisant.  Get funky, Son souffle est rondement tendu, extrêmement puissant. Le jeu de question-réponse entre les attaques de l'alto brillant et celles de la guitare rugissante installe une osmose sonore qui ne pouvait laisser personne indifférent. Physiquement, la marée humaine épouse le courant. Rentre dans le flow. Devient torrent.

Prince jongle avec tous les instruments : piano, basse et bien sûr une belle série de guitares, son instrument de jubilation. Tandis que la jeune Andy Allo occupe une place de premier plan. De sa jeune et troublante féminité, elle fait le lien entre les deux "sets" avec une reprise charnelle de The Look Of Love, a capela, puis en crescendo ruisselant sur une cascade d'instruments. Nothing Compares 2 U. Magnifique !

C'est bien vrai, on manque de s'évanouir. Mais, toujours maintenu en tension, le titre suivant nous place dans une nouvelle action. Chaque détail est abouti comme dans une fresque romantique. Les poils sont au garde à vous. Pas le temps de la relâche. Le goût des enchaînements est juste parfait. Toujours en hauteur stellaire, nous ne redescendons jamais sur terre. Hé ho ?!!? Vous m'entendez ? Un perpétuel décollage, je disais. Dans l'espace funky, les racines vulcaniennes parlent d'une culture retrouvée.

"J'aime être un tyran [la marque des grands ?]. Mais avec amour. Je leur demande un très haut niveau d'excellence, mais eux aussi sont perfectionnistes".

Panorama d'une personnalité irremplaçable, Prince nous offre ses premiers succès en espérant nous entendre – plus fort que lui – d'un même souffle chanter. Ils nous parlent doucement, nous demande de participer, plus que ça encore, de communier. "Continuer avec vos mains. Chantez... Je n'entend pas... Merci, à bientôt, au revoir ! Voilà ! Maintenant vous chantez. Plus fort Paris, faites moi danser !".

Les lucioles des briquets – des portables aussi, il paraît – tintent par touches incandescentes les entrailles de la grande soucoupe parisienne, transpercée par le tout premier ciel de juillet.

Il avait dit pas d'effets, que du son, du bon, du vrai. Les milliers d’hosties colorées, tournoyant dans les rayons de lueur, bleu-violet, n'étaient qu'une belle et grosse cerise à partager. Je l'ai d'ailleurs surement rêvé. La féerie finale, le mélodieux glissando de cette pluie tropicale, en paillettes pourpres, vient rigoler sur nos bouquets de larmes. "Vous êtes heureux Paris ? Moi aussi !!!". Pas une note n'est forcée. Les mises en places rebondissent sur le papier millimétré.

Tout autour, dans le tumulte de la foule qui rugit, on retrouve ses amis. Si nous n'étions pas à côté, nous étions tout de même ensemble... Le sentiment de partager un évènement. Le maître de la scène dirige nos sentiments. Tel un cordon bleu, il orchestre les émotions de milliers d'oreilles envoûtées, déguste lui aussi ses propres mets, prend du plaisir à donner.

Il avait fait six rappels, récemment à L.A. Paris n'en a eu droit qu'à trois... ça en valait bien sept. Un concert sur mesure a été concocté, ça se sentait. Lors d'une version extended de Little Red Corvette il nous replonge dans une juvénilité aujourd'hui sublimée. "Je pourrais jouer toute la nuit pour vous", a clamé l'artiste durant Kiss, le dernier morceau joué. Un smack qui claque la bise d'adieux douloureux. Mais les jambes flagellent.

Chaque concert de Prince est conçu comme une expérience, une porte ouverte sur l'inconnu. Très attaché à Paris, Prince remporte son défi de démesure, dans cette performance Live jubilatoire. Il dirige par le coeur. A tous ceux qui en doutaient ; et le voyaient déjà emprisonné dans les tiroirs d'une créativité (dé)passée, il leurs répond : "Je ne suis pas nostalgique musicalement des années 80. Je joue mieux de la guitare, je chante mieux, je suis un meilleur arrangeur". C'est vrai. Nous n'avons donc pas finit d'être étonné. Cet incroyable personnage résume une classe dans la modernité, l'élégance musicale d'un prince devenu Roi.

La soirée s'est terminée pour le chanteur dans un restaurant de Saint-Germain-des-Prés, dont l'accès n'a été possible que pour quelques fans avertis, heureux de déguster d'un ajout d'une quarantaine de minutes vers quatre heures du matin.

Régalez-vous maintenant : (Concert en intégralité - Olivier Temime).

Stade De France, 30 juin 2011 by TFE2



SONG LIST.


Pop Life
Musicology
Shhh
Everyday People
Come Together
Controversy
Sexy Dancer/Le Freak
Love Rollercoaster
Play That Funky Music White Boy
The Look of Love
Nothing Compares 2 U
Pass The Peas
Bass medley : 777-9311/Head/The Stick/America/Thank You For Talking To Me Africa
Take Me With U
Raspberry Beret
Cream
Cool/Don’t Stop ‘Til You Get Enough
Purple Rain
Let’s Go Crazy
Delirious
1999
Little Red Corvette
Sampler set : When Doves Cry/Nasty Girl/Sign’O'the Times/Darling Nikki/Forever in my Life/I Would Die 4 U
Kiss
Setlist La Société


A Love Bizarre
Let’s Work
U Got The Look
Misty Blue
We Live 2 Get Funky

1 commentaire:

  1. J'y étais aussi et c'était magique ! Merci pour cet audio, est-il possible de le podcaster et de le télécharger pour l'écouter en boucle sur mon iPhone ?

    Merci d'avance.

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