Pourquoi JASS ?

Pourquoi JASS ?
Le JAZZ a dans les veines du sang africain, c'est certain - jaja signifie "danser", jasi "être excité"- ; mais peut-
être aussi une racine enfouie, d'origine indonésienne -"jaiza" faisant écho aux sons des percussions. En français dirions-nous : "cela va faire jaser", parler ? Le 2 avril 1912, le Los Angeles Time évoque la jazz ball irrécupérable du lanceur Ben Henderson. Dérivé de l'argot, le mot jizz, renvoie à l'énergie, au courage et à la vigueur sexuelle. Le jasz a également l'odeur entêtante du JASMin, des parfumeries françaises de New-Orleans. A moins que l'étymologie du mot ne vienne de JASper, danseur esclave des années 1820, d'une plantation louisianaise ? Ou JASbo Brown, musicien itinérant et joueur de blues avant-gardiste de la fin du XIXe siècle ? Musique interdite, jouée dans les bordels, ce langage d'origine black american établit le lien indivisible entre le corps et l'esprit. Par la perpétuelle énergie de son discours, il puise dans l'Instant la force d'enrichir son long parcours, toujours bien vivant. J-ASS donne la fièvre et guérit ! Essayez-voir.

mardi 22 mars 2011

HARLEM STORY - part. 1. LENOX LOUNGE

288 Lenox Avenue,
Malcolm X Boulevard
entre la 124th & 125th rue.
Harlem.


HIER.

L'historique Lenox Lounge fait partie de la communauté de Harlem depuis 1939. Cette cathédrale du jazz servit de scène à des musiciens de légende. Miles. Coltrane. Billie... Sa Zebra Room, magnifiquement décorée dans un style Renaissance, est l'image d'Epinal d'une vie de quartier. Elle fut d'ailleurs un lieu de passage fréquent pour Malcom X, qui donna son nom à l'Avenue qui abrite le club. Complètement restauré en 1999, dans un soucis de concervation de son âme originelle, tendance art-déco, le Lenox Lounge fut élu "best of the best" des clubs de jazz new-yorkais par la guide nocture Zagat Survey et par le N.Y Magazine. Lieu de restauration traditionnelle, tout est agencé ici pour servir la musique, rien que la musique, black d'origine, évidemment. Chaque soir, une programmation variée est offerte à une clientèle de quartier, à des touristes aventuriers ,eux-aussi passionnés par les sonorités de d'un nostalgique passé, eux-aussi en quête de découvrir de nouveaux artistes éloquents.
Servant de Q.G. À à Samuel L. Jackson dans le film remake SHAFT, mais également de cadre cinématographique pour plusieurs scènes du film AMERICAN GANGSTER, cette salle zébrée a été et demeure encore un lieu incontournable de l'histoire culturelle de Harlem.


AUJOURD'HUI.

Chaque soir un concert. De la soul, du swing, du pûr Be-bop, du jazz new generation, du traditionnel...

Eric Wyatt se produit en ce moment au Lenox. Comme celle de son saxophone, l'homme à la grosse voix remplie d'un son de rocaille l'arrière salle réservée aux amateurs de musique. Pûre et brute comme un joyau encore prisonnier de la roche minérale, son univers est inspiré par le mouvement de cette ville dans laquelle il est né, qu'il n'a jamais voulu quitter. Vivant à Brooklyn, ses voyages se font traditionnellement en musique. Ils prennent formes dans les rencontres d'un soir et dans les discours inspirés de ses compositions aux natures libres. En effet, l'essentiel de son répertoire est construit sur un jeu dit "ouvert", modal, enfanté par le théoricien Georges Russel et utilisé par de nombreux artistes tels que Coltrane (Love Supreme), Herbie Hancock (Maiden Voyage) ou Bill Evans (Piece peace). Ce type de construction permet de décloisonner les thèmes, leurs cadres mélodiques, et de libérer toute l'expressivité du soliste. Très inspiré dans sa tenue sonore par Sonny Rollins ou Dexter Gordon, son jeu me fit également beaucoup penser à celui de Dewey Redman.

Les coups d'oeils complices entre le pianiste vénézuelien Benito Gonzalez – compagnon de route d'Eric Wyatt–, et le drummer Shinnosuke Takahashi traduisent toute la complicité de ce quintet de haut vol. D'ailleurs, c'est bien le nouveau venu, cet incroyable batteur japonais, qui attira tous les regards ce soir. Un cheval au galop. Une tornade de rapidité : artillerie lourde, coups de mitraillettes, explosions d'obus. La tenue inpeccable de son groove up-tempo donne l'impression, dans ses grands mouvements fluides, qu'il pourfend l'air épais s'échappant des vapeurs liquoreuses Jameson. Pourtant, rien n'est jamais poussif dans son jeu rempli de spiritualité. Il plaque le rythme un brin avant que le temps ne tombe, ce qui provoque une sensation dansante, un swing qui ne jamais ne s’essouffle. Dans l'exécution rythmique, il est parfaitement secondé par le contrebassiste – lui-aussi japonais – Mutoki Mittaro, qui, de ses triples croches enchaînées, permet aux deux solistes de déployer toute leur expressivité d'improvisateurs. Formation extrêmement tonique et rieuse ; mélodies percutantes toutes faite de rebonds, de brisures, de découpages composées, remplissent la salle zébrée du Lenox. Le public envoûté s'embrase et laisse exploser sa belle émotion si spontannée.


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