Pourquoi JASS ?

Pourquoi JASS ?
Le JAZZ a dans les veines du sang africain, c'est certain - jaja signifie "danser", jasi "être excité"- ; mais peut-
être aussi une racine enfouie, d'origine indonésienne -"jaiza" faisant écho aux sons des percussions. En français dirions-nous : "cela va faire jaser", parler ? Le 2 avril 1912, le Los Angeles Time évoque la jazz ball irrécupérable du lanceur Ben Henderson. Dérivé de l'argot, le mot jizz, renvoie à l'énergie, au courage et à la vigueur sexuelle. Le jasz a également l'odeur entêtante du JASMin, des parfumeries françaises de New-Orleans. A moins que l'étymologie du mot ne vienne de JASper, danseur esclave des années 1820, d'une plantation louisianaise ? Ou JASbo Brown, musicien itinérant et joueur de blues avant-gardiste de la fin du XIXe siècle ? Musique interdite, jouée dans les bordels, ce langage d'origine black american établit le lien indivisible entre le corps et l'esprit. Par la perpétuelle énergie de son discours, il puise dans l'Instant la force d'enrichir son long parcours, toujours bien vivant. J-ASS donne la fièvre et guérit ! Essayez-voir.

vendredi 25 mars 2011

L'Espagne et Wynton Marsalis au Lincoln Center.

Le Jazz at Lincoln Center présente une suite espagnole venue de Nouvelle-Orléans.

Wynton Marsalis n'est pas un artiste qui a pour habitude de faire les choses à moitié. Trouvant passionnant le souhait exprimé par un de ses proches amis, « écris moi un blues », il passa plus de six années à réaliser ce projet ambitieux. Il s’attelle au travail d'une suite, une saga pourrait on dire, de compositions originales répertoriées en différents chapitres. Vitoria Suite l'a t-il appelé. Un travail en 12 parties, inspiré par les 12 mesures d'un blues. Il la connaît bien cette musique le jeune Wynton. Ellis (le père), Branford, Delfeayo, Jason (les frangins)… tous Marsalis, tous originaires de La Nouvelle-Orléans, le berceau du jazz. Il n'est donc pas étonnant que les héritiers de cette tradition continuent de célébrer en musique le patrimoine de leurs ancêtres. Depuis les années 30, la famille Marsalis préserve la culture néo-orléanaise de génération en génération.
Wynton utilisa donc cette essence du blues comme une clef de voûte, couronnant son œuvre, parfaisant sa grande fresque musicale. Pourtant, Le concept de cet album ne se confine pas qu'à cela. Chaque thème assimile les fondements d'une musique maîtresse dans une quête exploratrice, jusqu'aux abords d'autres contrées musicales. En gardant le cap dans son investigation sur ses racines musicales afro-américaine, il en vient à s’éprendre du folklore espagnols et basque. Le flamenco. Musique hybride, elle aussi. Si l'Histoire permis à la péninsule ibérique de goûter à des sonorités africaines, plus particulièrement arabes, elle fut également un des points de ralliement final du parcours incroyable des musiques indiennes, klezmer, roms, yiddish, tziganes, manouches...
Duke Ellington a dit que « la mémoire des choses du passé est primordiale pour les musiciens jazz, ce qui signifie que la conscience d'un héritage musical consolide l'essence de cette musique ».
Wynton dira : « Pour quelqu'un d'extérieur, ce n'est pas véritablement possible d'interpréter cette musique de la manière de ses exigences culturelles. Il était intéressant d'essayer de piocher des éléments de cette musique régionale et de la transcrire à la façon du Jazz. Ma musique. ». Il donna en réalité un accent à son blues. Une couleur musicale imprégnée d'Espagne. C'est pourquoi cette performance ne pouvait être enregistrée seulement par des musiciens américains. En plus d'une rencontre de cultures, Vitoria Suite est également une improbable rencontre humaine. Les jazzmen américains nouvelle génération se mêlent aux plus grands instrumentistes de l'Espagne. Le talentueux guitariste flamenc', Paco de Lucia, certainement le plus universel des musiciens espagnols, inimitable technicité émotionnelle, incomparable talent d'innovation. Et Chano Dominguez, l'un des pianistes qui a le plus œuvré pour la création du flamenco ; véritable explorateur intrépide naviguant de ses mélodies envoûtantes jusqu'aux aux frontières du jazz. En exergue, le quatrième mouvement de la Suite, Bulería El Portalón, mettant Paco et Chano particulièrement en évidence et témoignant alors de la puissance d'une collaboration multiculturelle. Si le premier disque est plus puissant que le second, c'est par l'émanation des percussions à la main, ligne de fond entêtante et décalée, l'une des plus parlantes originalités du projet. Paco, guide passionné, caractère sanguin, démiurge des sons et impressionnistes des paysages pelés d'Algesiras, insuffle un chant profond, résonnant dans chaque pièce de cuivre de la formation.
Gil Evans et Miles avaient déjà caressé les courbures alhambresques de la musique de Rodrigo et de Manuel de Falla. Jim Hall, Chet et Paul Desmond eux aussi avaient magnifiés le celèbre Concierto en une délicate peinture improvisée. Mais dans les deux cas, le jazz avait transposé une partition déjà écrite et lui avait donné une interprétation. D'une autre sorte, Charles Mingus avait réalisé sa suite Tijuana Moods et Duke Ellington sa Latin american suite. Dans le cas de Vitoria Suite, il n'y a pas eu d'adoption. Ce furent les deux cultures à l'unisson qui conçurent et interprétèrent une partition jamais encore jouée.
Ce n'est pas tout. Vitoria ? Pourquoi, au fait ?
Et bien, L'ami en question... oui, l'instigateur du projet, si vous suivez toujours ! L'ami, donc, s'appelle Iñaki Añua et n'est autre que le directeur du Festival international de jazz de Vitoria-Gasteiz, ayant accueillit à plusieurs reprises les membres du clan Marsalis. C'est à l'occasion des 25 ans du festival qu'il souhaitait une composition originale pour Vitoria. Cinq ans plus tard finalement, la Suite de Wynton devint, dans sa forme étendue, une nouvelle œuvre orchestrale rendant à la fois hommage à un Festival, mais aussi à une ville et à une culture à part entière.
Tous les classiques se rencontrent dans ce projet. Musique orchestrale européenne ; traditions gitanes, basques, andalouses ; musique blues afro-américaine. L'ensemble, une sorte de jazz, un langage universel tout simplement.


Ce projet tout en contrastes, enregistré en 2010, dans la mythique salle du Lincoln Center, revient réchauffer les murs du théâtre Rose pour trois soirs de représentations très attendues (31 mars, 1er et 2 avril). Tous complets. Demandez le débriefing...



JAZZ AT LINCOLN CENTER ORCHESTRA WITH WYNTON MARSALIS
Wynton Marsalis – Music director, trumpet.
Sean Jones, Ryan Kisor, Marcus Printup – Trumpets.
Vincent Gardner, Chris Crenshaw, Elliot Mason – Trombones
Sherman Irby – Alto saxophone
Ted Nash – Alto and soprano saxophones, clarinet
Walter Blanding Jr. – Tenor and soprano saxophones, clarinet
Victor Goines – Tenor and soprano saxophones, Bb clarinet, bass clarinet
Joe Temperley – Baritone and soprano saxophones, bass clarinet
Dan Nimmer – Piano
Carlos Henriquez – Bass
Ali Jackson – Drums.

SPECIAL GUESTS
Paco de Lucia – Guitar (Mvt. IV, VIII)
Chano Dominguez – Piano (Mvt. VI)
Israel Suarez “El Piraña” – Percussion (Mvt. VI)
Tomás Moreno “Tomasito” – Jaleo, clapping and dance (Mvt. VI)
Blas Cordoba “El Kejio” – Jaleo and clappings (Mvt. VI)

Avant goût :


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