Une musique dans le vent.
La première fois que j'ai rencontré Ambrose Akinmusire, c'était en France, dans le quartier du Marais. Je savais qu'il aimait venir se ressourcer à Paris quand il ne jouait pas sur les planches new-yorkaises. Cette ville l'inspire. Une rupture avec le rythme à cent à l'heure de Big Apple certainement. Je l'ai immédiatement interpellé. Nous avons passé quelques minutes adossés à un pan de mur en pierre de la rue Vieille du Temple. Il cherchait de belles chaussures en cuir, le black dandy. Une passion commune qui créa un lien instantané. Je le conduit très vite sur un autre terrain de discussion, plus qu'un hobby, une drogue : le jazz.
Son premier album solo « Prelude to Cora » était sorti depuis déjà plusieurs mois. Maintes et maintes fois il avait rodé mon ampli à tube Cayin. Il faisait parti de ces disques qu'on écoute une première fois et qui, immédiatement, interpellent. Un vent nouveau. Plus on le réécoute, plus il devient notre. Si à chaque fois c'est une surprenante découverte, c'est parce que la musique d'Ambrose est d'une richesse perpétuelle. Outre une technicité clairement maîtrisée, et ce en dépit de son jeune âge (il aura 29 an le 1er mai), l'univers d' « Ah-Kin-Moo-See-Ray » est une véritable ouverture sur le monde ; un voyage allégorique. Son grain de trompette limpide se ballade sur la brèche et capte une émotion tourbillonnaire en constante élévation. Contemporain futuriste, il puise avec parcimonie l'émotion des musiques qui l'ont inspiré. Les nappes vocales de Junko Watanabe apportent un lyrisme incantatoire à l'expressivité des instrumentistes.
En 2007, c'est le prix Thélonious MONK qui lui permet de signer chez le prestigieux label BLUE NOTE. Il reçoit également le Carmine Caruso International Jazz Trumpet Solo Competition, une distinction très prisée dans la famille des grands souffleurs. Son diplôme de la Berkeley en poche, il déménage à New York pour intégrer la Manhattan School of Music où il prend des cours avec Vincent Pinzerella (de l’orchestre philharmonique de New York), Dick Oatts, Lew Soloff et Laurie Frink. A l’aube de ses 18 ans, il avait déjà joué avec des musiciens aussi prestigieux que Joe Henderson, Joshua Redman, Steve Coleman, ou encore Billy Higgins.
C'est bien vrai, le jeune nigérian a l'ossature d'un géant, qui trace de ses petits pieds – bien chaussés – l'empreinte digitale d'un renouveau pour le jazz, et pour la musique contemporaine en général. Casser les conventions, les remodeler, voici son ambitieuse démarche. Il n'y a pas de solos dans les compositions d'Ambrose, chaque intervention et chaque effet sont déployés au service d'une idée, d'un ensemble, que j’appellerais « climat sonore ».
Certes, son jeu de trompette se caractérise par une virtuosité sans faille. Sa sonorité limpide est à l'image de son tempérament, inspirée et humble. Sans cesse en quête de nouveaux effets, dans les graves ou avec ses jeux d'embouchures, par exemple, il conserve, au dessus de tout, un goût pour la mélodie, essence même de ses compositions. Le ressentit et la profondeur du jeu, témoignent de la sagesse de l'instrumentiste qui contient son potentiel musical et trouve toujours le juste équilibre, l’assaisonnement parfait pourrait-on dire. Toute en nuance, conceptuelle et visionnaire, sa musique sert avant tout la beauté de l'émotion. Il me plaît de la comparer à la synergie d'un moulin à vent, toujours en mouvement, déployées ses grandes toiles robustes, aux abords des immenses plaines pelées nigérianes. Sa création s'oppose bien à la stagnation. Il invente sans cesse un langage qui se renouvelle, aime surprendre dans l'utilisation de ces longs silences qui soupirent, dans la tension des lignes mélodiques et, bien entendu, dans la rotation de l'échange créée avec ses amis musiciens. Peut-être une ligne de conduite qui ferait partie de sa vie et déteindrait sur les mots de sa musique. N'ayant de semblables, c'est face à lui même que nous le voyons progresser. Il rejette le confort et s'assied aisément sur une grosse pierre angulaire nommée inspiration.
Son deuxième album : "When the heart emerges glistening" sort aujourd'hui. Ayant eu la chance de l'écouter, mon cœur a bien scintillé comme il le souhaitait. L'ensemble du projet vibre magnifiquement de toute son originalité. La puissance de la formation d'Ambrose, dans l'exécution de ces nouvelles compositions, ajoutée à l'utilisation de bandes orchestrales, crée un projet à la patte marquée, éminemment tournée vers l'avenir. Sa collaboration de longue date avec le voluptueux saxophoniste Walter Smith III, trouve toute l'expressivité de deux souffles contraires mêlés l'un dans l'autre.
Une nouvelle étape pour Ambrose qui s'engage, dès lors, dans une grande tournée débutant les 14 15 16 et 17 avril au Jazz Standard, puis se poursuivra en Europe pour 12 dates -à ne pas manquer- et finira sur la côte Ouest des États-Unis, cet été.
A ses côtés le saxophoniste tenor Walter Smith III, le pianiste Sam Harris, le bassiste Harish Raghavan, et le batteur Justin Brown.
Pourquoi JASS ?
Pourquoi JASS ?
Le JAZZ a dans les veines du sang africain, c'est certain - jaja signifie "danser", jasi "être excité"- ; mais peut-être aussi une racine enfouie, d'origine indonésienne -"jaiza" faisant écho aux sons des percussions. En français dirions-nous : "cela va faire jaser", parler ? Le 2 avril 1912, le Los Angeles Time évoque la jazz ball irrécupérable du lanceur Ben Henderson. Dérivé de l'argot, le mot jizz, renvoie à l'énergie, au courage et à la vigueur sexuelle. Le jasz a également l'odeur entêtante du JASMin, des parfumeries françaises de New-Orleans. A moins que l'étymologie du mot ne vienne de JASper, danseur esclave des années 1820, d'une plantation louisianaise ? Ou JASbo Brown, musicien itinérant et joueur de blues avant-gardiste de la fin du XIXe siècle ? Musique interdite, jouée dans les bordels, ce langage d'origine black american établit le lien indivisible entre le corps et l'esprit. Par la perpétuelle énergie de son discours, il puise dans l'Instant la force d'enrichir son long parcours, toujours bien vivant. J-ASS donne la fièvre et guérit ! Essayez-voir.
Le JAZZ a dans les veines du sang africain, c'est certain - jaja signifie "danser", jasi "être excité"- ; mais peut-être aussi une racine enfouie, d'origine indonésienne -"jaiza" faisant écho aux sons des percussions. En français dirions-nous : "cela va faire jaser", parler ? Le 2 avril 1912, le Los Angeles Time évoque la jazz ball irrécupérable du lanceur Ben Henderson. Dérivé de l'argot, le mot jizz, renvoie à l'énergie, au courage et à la vigueur sexuelle. Le jasz a également l'odeur entêtante du JASMin, des parfumeries françaises de New-Orleans. A moins que l'étymologie du mot ne vienne de JASper, danseur esclave des années 1820, d'une plantation louisianaise ? Ou JASbo Brown, musicien itinérant et joueur de blues avant-gardiste de la fin du XIXe siècle ? Musique interdite, jouée dans les bordels, ce langage d'origine black american établit le lien indivisible entre le corps et l'esprit. Par la perpétuelle énergie de son discours, il puise dans l'Instant la force d'enrichir son long parcours, toujours bien vivant. J-ASS donne la fièvre et guérit ! Essayez-voir.
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