Leçon hip de jazz-hop
Un an après la disparition du grand G.U.R.U, arrangeur, chanteur, producteur, mixeur, la scène hip-hop se rappelle, en costume jazz, d'un de ses plus charismatiques maîtres d'école...
La spacieuse salle du Poisson Rouge, située en plein Greenwich Village, sur la célèbre Bleeker Street, accueillait l’évènement, jeudi soir dernier. A la croisée des musiques tangentielles, ce lieu est un chic caveau expérimental. Du jazz en trame de fond, ce sont toutes les musiques contemporaines arborescentes qui y sont programmées. Les jours se succèdent et ne se ressemblent pas. L'O.N.J (Orchestre National de Jazz), avec Daniel Yvinec et l'ensemble de John Hollenbeck, s'y produira lundi 25 avril.
FLASH BACK
De 1989 à 2003 Keith Elam, alias G.U.R.U (Gifted Unlimited Rythmes Universal) fonde avec DJ Premier le groupe Gang Starr. Du vrai bon hip hop à la sauce old school. Epurés, sans fioritures, les mots claquent comme des tambours.
Parallèlement à Gang Starr, il s'est également lancé, à partir de 1993, dans des projets solitaires, regroupés sous l'appellation JAZZMATAZZ. Volte-face diront certains. Le voyou G.U.R.U s'est il confessé ? Une simple envie de voyager à l'intérieur de sa Soul, diras t'il. JAZZMATAZZ swingue. Un jazz tasé d'une énergie urbaine new generation. C'est pourtant bel et bien du rap. La même voie de rocaille, des beat bien groovy. Il n'y a pas de doute, on reconnaîtrait sa patte entre mille. Toutefois, les structures musicales sont indéniablement plus fouillées. On retrouve dans le triptyque JAZZMATAZZ un travail d'écriture cohérent, une inspiration d'initié. Le flow, saccadé et binaire, se mêlent aux formes circulaires du jazz de ses racines.
Les premiers musiciens ayant rendu possible l'avènement du jazz rap sont des artistes comme les Last Poets ou le poète-chanteur Gil Scott-Heron, dans les années 70. C'est Miles Davis, avec son album posthume Doo-Bop (1992), qui, pour la première fois, intégra des éléments de la musique rap dans le jazz.
Un an après Doo-Bop, G.U.R.U. se lance dans ce tout nouveau style. Pour exécuter ses ambitieux projets, il s'entoure d'une armada de musiciens pas digoulasse. Le premier volume accueil entre autres Donald Byrd, Lonnie Liston Smith, Roy Ayers et, le frenchy Mc Solaar. Le bien, le mal... les loulous ne sont pas si méchants. Je me remémore les clips vidéos des lascars en couche culotte. Le look ! Sans les images c'est autre chose !
Les volumes II et III rassemblent des vedettes de la scène R'n'B tels que Jamiroquai, Macy Gray, Erykah Badu ou Me'Shell Ndgeocello, avec des piliers du hip-hop, comme par exemple the Roots et Bilal. Des stars de la soul music côtoient des grands noms du jazz. Isaac Hayes, Chaka Khan, Ramsey Lewis, Brandford Marsalis, Courtney Pine, Kenny Garrett ou Herbie Hancock. Même Freddie Hubbard fait son apparition remarquée. Finalement seul le public puriste du rap ronchonnera, un court instant, ces projets.
Dans tout cela, la ligne directrice est l'ouverture de la musique noire à toutes ses nuances. Blues, jazz, soul, funk, hip hop, c'est la même fibre pour G.U.R.U. Seule l'éxécution change, selon l'espace temps dans lequel elle apparaît. Partant du constat que la grande majorité des Noirs américains évoluent au sein d'une cellule familiale éclatée, il décide alors d'utiliser sa notoriété pour réveiller les consciences. Les projets sont populaires. Ils n'en souffrent absolument pas. Le MC de Brooklyn exporte sa musique dans des foyers qui auparavant n'écoutaient pas de hip-hop. Tant mieux. Sa musique n'est, pour autant, pas faite de compromis. Maître G.U.R.U savait où il allait.
JEUDI 21 AVRIL
Pour honorer la mémoire d'un personnage aussi unique, il fallait tout le talent du REVIVE DA BIG BAND. Les jazzmen rendent hommage au rap ? C'est déroutant. Ça fonctionne pourtant à merveille.
Si le hip hop a un goût brute de pomme, l'utilisation de lignes mélodiques – créées par de vrais instruments, bien vivants – lui confère une rondeur, une humanité. On a envie de bouger. Dès les premières mesures, nos corps sont envoûtés. Le syndrome James Brown. Poum poum, debout ! L'effet de 10 dark dog's par mesure. Les paroles, toujours bien vindicatives, rebondissent sur des trampolines rembourrés de poudreuse. Ainsi, j'arrive à rentrer dans le texte et vêtir une fringante énergie retroussée de pudeur. Faire des choses contraires à son tempérament, par simple assimilation sonore. Je devient Shaft, gangsta black, invincible. Les émotions énergisantes travaillent un inconscient saboteur et évacuent nos boules de retenues chrétiennes. C'est une histoire de génération, ou alors simplement de décloisonnement oreillère. Ouvrons les portes du hip-hop.
Quoiqu'il en soit, pas besoin de survet' Tacchini pour faire parti du crew. Une classe ambiante émane du Poisson rouge. Sortie de son bocal, la musique respire.
Le concert répondait à une autre structure que celles magnifiquement développées par G.U.R.U tout en demeurant fidèle à l'énergie du défunt MC. Un Big-Band à la classe décontractée. Quatre trombonistes, deux sax ténors, deux altos, un baryton, cinq trompettistes – dont le talentueux Igmar Thomas en soliste –, Mike Moreno à la guitare electrique et Marc Cary au piano ainsi qu'à la direction. Pour la structure rythmique, il y avait du lourd. Percussions, drums, basse et DJ Logic aux platines. Ce dernier s'est fait connaitre au milieu des années 90 pour les injections jazzy à l'intérieur de ses mix. Count Basie, Stanley Turrentine, Miles Davis trouvent leurs place dans les couloirs sonores du rap. Extrêmement innovant, il collabora avec des jazzmen tels que Medeski Marton & Wood, Christian Mc Bride, Vernon Reid, Jack de Johnette, John Mayer...
Revivre le hip hop 90's par ses origines, le jazz. L'expérience contre courant est audacieuse et touchante. Les vieux jazzmen saluent le talent d'un rappeur qui savait écrire la musique. Une pépite d'or dans le sable.
Wilson, HIP HOP DX, slam son discours final : " Nous avons perdu un trésor international. GURU. GURU. La musique que tu a faite avec DJ Premier. Ton JAZZMATAZZ. Oh GURU. Tu as changé ma vie. Quel honneur de partager la soirée avec tes amis ; avec ta famile. Ta carrière restera dans les mémoires, ton style est une porte ouverte sur le futur. Ton infuence laisse une trace, G.U.R.U ton style métissé est noir comme le feu. Ecoute ce big band. Entends-tu le jazz te rendre hommage ? "
Tandis que le neveu de G.U.R.U, Justin Elam-Ruff, se déchaîne dans une impro slam slang, la jeune Sharel Cassity (seule femme sur scène) fait hurler son sax alto et propulse les mots dénudés au nirvana.
Toute une génération de rappeur, Talib Kweli, Jeru the Damaja, Masta Ace, Lord Finesse... la crême du hip hop new-yorkais, se prête au jeu. Ils sont conduits par l'orchestre, portés par la puissance des cuivres.
Les Tap Messengers font une apparition sur les planches. Ils rapent des copeaux de bitume, les chaussures cirées façon années 30.
La recette du minestrone jazz-hop a parfumé la cuisine fusion d'un modernisme outrancier. Un nouveau plat à la carte des sonoritées afro-new-yorkaises. Aujourd'hui, des groupes comme A Tribe Called Quest, Beat Assaillant ou Roy Hargrove - avec ses RH.Factor - répondent tous de l'héritage flamboyant de G.U.R.U, le non-sectaire.
En France, il existe aussi une scène hip-hop-jazz des plus locaces, Jazz Liberatorz en tête de file. D'autres rappeurs comme Rocé ou Oxmo Puccino (avec The Jazz Bastards) se produisent entourés de musiciens de jazz. Le sample arrive t'il à péremption ?
Pourquoi JASS ?
Pourquoi JASS ?
Le JAZZ a dans les veines du sang africain, c'est certain - jaja signifie "danser", jasi "être excité"- ; mais peut-être aussi une racine enfouie, d'origine indonésienne -"jaiza" faisant écho aux sons des percussions. En français dirions-nous : "cela va faire jaser", parler ? Le 2 avril 1912, le Los Angeles Time évoque la jazz ball irrécupérable du lanceur Ben Henderson. Dérivé de l'argot, le mot jizz, renvoie à l'énergie, au courage et à la vigueur sexuelle. Le jasz a également l'odeur entêtante du JASMin, des parfumeries françaises de New-Orleans. A moins que l'étymologie du mot ne vienne de JASper, danseur esclave des années 1820, d'une plantation louisianaise ? Ou JASbo Brown, musicien itinérant et joueur de blues avant-gardiste de la fin du XIXe siècle ? Musique interdite, jouée dans les bordels, ce langage d'origine black american établit le lien indivisible entre le corps et l'esprit. Par la perpétuelle énergie de son discours, il puise dans l'Instant la force d'enrichir son long parcours, toujours bien vivant. J-ASS donne la fièvre et guérit ! Essayez-voir.
Le JAZZ a dans les veines du sang africain, c'est certain - jaja signifie "danser", jasi "être excité"- ; mais peut-être aussi une racine enfouie, d'origine indonésienne -"jaiza" faisant écho aux sons des percussions. En français dirions-nous : "cela va faire jaser", parler ? Le 2 avril 1912, le Los Angeles Time évoque la jazz ball irrécupérable du lanceur Ben Henderson. Dérivé de l'argot, le mot jizz, renvoie à l'énergie, au courage et à la vigueur sexuelle. Le jasz a également l'odeur entêtante du JASMin, des parfumeries françaises de New-Orleans. A moins que l'étymologie du mot ne vienne de JASper, danseur esclave des années 1820, d'une plantation louisianaise ? Ou JASbo Brown, musicien itinérant et joueur de blues avant-gardiste de la fin du XIXe siècle ? Musique interdite, jouée dans les bordels, ce langage d'origine black american établit le lien indivisible entre le corps et l'esprit. Par la perpétuelle énergie de son discours, il puise dans l'Instant la force d'enrichir son long parcours, toujours bien vivant. J-ASS donne la fièvre et guérit ! Essayez-voir.
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